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CHAPITRE 01

Dans cette vie, nous avons tous une histoire. Toute personne sans histoire est nulle. Même le fou en a une, une histoire propre à lui. Voilà pourquoi j’ai aussi mon histoire. Une histoire douce-amère. Une histoire qui fait pleurer. Coupez tout et lisez-moi. Sinon tout a commencé quand j’étais encore adolescente.

En effet, on m’appelle Grâce Vodounon. Je suis originaire du Bénin, précisément de la vallée de l’Ouémé. Je suis mère de quatre enfants dont trois filles : Trixia, Cécile et Germaine. Junior, est mon unique garçon et mon benjamin.

Je suis d’une famille modeste relativement riche. Ce qui fait que mes parents et moi habitions dans une petite villa. Cette villa était faite de tout. On y trouvait une petite piscine et un jardin. Mon papa s’appelait Denis et ma mère, Célestine. Papa est une personne de grande carrure. C’est un mignon gars qui avait née des moustaches touffues qu’il prenait le soin de tailler à ses heures de repos.

Je ne suis pas l’aînée de ma famille. J’ai une grande sœur qu’on appelait Brigitte ; elle avait vingt-et-un ans. J’ai aussi un grand frère qu’on appelait Vivien. Dans ma famille, la rigueur était au sommet en matière d’éducation puisqu’elle était considérée comme la base fondamentale de la réussite. Et pour m’en passer, je me méfiais beaucoup. Malgré ma méfiance, j’ai fini par avoir de gros ennuis. Je l’avoue sans honte parce que j’en ai beaucoup souffert.

Comment était arrivée cette tragédie qui a presque changé toutes les séquences de ma vie ?

J’ai du mal à la raconter. Pourtant, c’est ce que je compte faire. Raconter mon histoire en quelques lignes à mes jeunes sœurs afin qu’elles fassent très attention avec la vie et les hommes car, tous les hommes ne sont pas sérieux. Au début des relations, nous les trouvons gentils et joviaux mais au fil du temps, ils se métamorphosent et ne se souviennent plus d’aucune des précieuses promesses qu’ils nous avaient faites.

Alors chères sœurs, cette histoire vous concerne ; vous devriez la lire rigoureusement. Cette épreuve ne m’avait pas été facile, chers lecteurs. J’étais encore adolescente et innocente lorsque tout a commencé ; lorsque le ciel est tombé sur ma tête.

En effet, c’était lorsque j’étais en classe de quatrième. Un jour, à la sortie de mes cours de midi, mes camarades et moi nous mîmes dans les ruelles pour regagner nos maisons respectives en périphérie de la ville quand tout à coup, j’entendis quelqu’un siffler dans mon dos. Ne sachant à qui s’adressait l’auteur du sifflet, j’en fis mine de n’avoir rien entendu. Et d’ailleurs, je n’étais pas la seule à marcher dans la rue ; et aussi, je n’étais ni poule ni pintade pour répondre à ce genre d’appel dont j’ignorais l’auteur. Je considérai le sifflet comme un appel adressé à quelqu’un d’autre.

Au bout de quelques secondes, les sifflements s’intensifiaient. Toujours était-il que je ne calculais pas la voix de l’inconnu.

Tout à coup, Vanessa, ma copine de classe avec qui j’acheminais tourna la tête en arrière et l’intéressé lui fit comprendre d’un signe de la main que ce n’était pas à elle qu’était destiné l’appel mais plutôt à moi.

– S’il te plaît Grâce, quelqu’un t’appelle derrière, me dit ma copine.

– Oh Vanessa, ne lui prête aucune attention ; presse les pas on va vite disparaître d’ici, lui répondis-je sans regarder derrière.

– Non mais Grâce, essaie de répondre tout au moins à son appel ; peut-être qu’il voudrait te dire quelque chose !

– Vanessa, peux-tu essayer de lui faire mine ? Ou si ça te chante, tu pourrais lui répondre à ma place, lui répliquai-je, énervée.

– Comment tu peux dire ça ? Quand tu me regardes, est-ce que mes seins se sont déjà développés comme les tiens ? hasarda-t-elle.

– Putain de merde ! Vanessa, ne m’énerve pas davantage cette après-midi, d’accord ? Et de grâce, évite surtout de me provoquer.

Me sentant déjà en colère, ma copine ne pipa plus mot.

– Et si ce que tu as sur la poitrine ne sont pas des seins, sont-ce alors des citrons ? ajoutai-je.

Pendant que Vanessa et moi étions en train de nous mordre la langue, le siffleur s’empressa et nous rattrapa. Arrivé à notre hauteur, il nous sourit et nous montra ses jolies dents. Ma copine et moi échangeâmes entre nous un regard innocent.

– Bonjour mademoiselle, commença-t-il en me fixant du regard ; vas-tu me dire que tu n’entendais pas ma voix depuis ? m’écria-t-il comme si nous étions familiers ou qu’on se connaissait depuis des lustres.

– Je suis désolée ! m’exclamai-je, inquiète.

L’homme me fixait toujours du regard sans s’en détacher.

– En fait, j’étais un peu pressée parce que j’ai un autre cours tout à l’heure à quatorze heures, continuai-je avec tristesse.

– Cela voudra dire que c’est la raison pour laquelle tu m’avais ignoré tout ce temps ? Et si je te donnais un coup de marteau sur la tête, que vas-tu dire ? me cria-t-il d’une voix perçante.

Je pris peur et commençai à grelotter telle une poule mouillée d’une forte pluie.

Comment peut-il me donner un coup de marteau sur la tête ? Restait-il encore des méchants de l’époque de Jésus-Christ sur cette terre ? songeai-je.

Ma copine, quant à elle, était pâle, calme, silencieuse et me regardait. C’est alors qu’une pensée me hanta l’esprit et me chuchota de lui présenter mes excuses afin qu’il nous laisse passer.

– S’il vous plaît, ne me donnez pas de coup de machette sur la tête je vous en prie. Ma tête n’est pas assez dure pour supporter ce coup. Elle pourrait se fendre en deux, lui répondis-je en révérencieusement.

En fait, lorsque j’étais encore très jeune, j’avais beaucoup peur. Je n’aimais pas qu’on me fasse du mal. Et c’est surtout la raison pour laquelle à l’école, jamais je ne me querellais.

– Bien, reprit-il après m’avoir longuement observée ; on dirait que tu en sais déjà quelque chose de la raison pour laquelle je t’appelais et c’est pourquoi tu ne t’arrêtais pas, continua-t-il cette fois d’un ton un peu rassurant.

– Non, je n’en sais absolument rien ! lui répondis-je, sérieuse.

– Arrête de nier ! Sûrement que tu le savais, et c’est la raison pour laquelle tu faisais le paon. D’ailleurs, dis à ta copine de partir.

– De partir ? Elle ne peut pas. Elle est ma sœur et jamais elle ne peut rentrer à la maison sans moi sinon on sera toutes les deux punies, lui mentis-je.

– Ok, quelle classe fais-tu ?

– Je fais la sixième, lui mentis-je de nouveau.

– Pour qui me prends-tu ? Pour une personne née de la dernière saison ou pour un buveur de thé ? commença-t-il par me gronder.

Mon Dieu ! Mais, d’où était sorti cet imbécile pour me faire si peur ? Pour qui se prend-t-il ? Et si je criais au secours, me laissera-t-il passer ?

Et Vanessa, pourquoi ne pouvait-elle pas dire quelque chose au moins pour me sauver de l’affaire ? Ou était-ce un plan établi entre eux deux ? Mille et une questions m’effleuraient l’esprit car, Vanessa et moi étions de meilleures amies et on se défendait presque tous les jours. Mais où lui était passé ce cœur de protection et de défense ? Va-t-elle se taire et on allait me faire du mal.

Or, la peur avait toujours été le plus grand défaut de ma camarade et je le savais moi-même.

– Tu ne réponds pas ou veux-tu que je t’arrache les cheveux avant que tu ne parles ? me demanda-t-il en sortant de sa poche une paire de ciseau.

Son regard était très dur. Je m’imaginais déjà dans une grande merde.

– Non, ne faites pas ça ; ne m’arrachez pas les cheveux je vous en supplie. Et toi Vanessa, tu ne dis rien ?

– Laisse-le on va partir ou bien c’est quoi la chose ? répartit ma copine.

L’inconnu fut vexé par cette phrase et voulait se rapprocher davantage de nous les deux. Que voulait-il nous faire ? Nous frapper ? Nous arracher nos cheveux ? Ou plutôt nous donner des coups de machette sur la tête ?

Et puisque Dieu est toujours vivant et n’abandonnait jamais ceux qui l’imploraient, mon père apparut avec sa grosse voiture. Il la gara puis ma copine et moi courûmes et le montâmes à bord. Pendant que mon père redémarrait le véhicule, j’ai jeté un coup d’œil par la vitre et aperçus le jeune homme debout en train de secouer incessamment la tête en guise de regret.

« Merci Seigneur » me dis-je tout bas.

Mais d’où venait-il en réalité ? Pourquoi parmi toutes ces jeunes lycéennes qui passaient dans la rue, c’était plutôt moi la pauvre que cet imbécile voulait faire du mal ? Pourquoi étaient-ce mes cheveux qu’il préférait arracher et non mes sourcils ? Et que lui ferais-je la prochaine fois qu’il osera s’afficher sur mon trajet ? Crier au secours ? Le fuir ? Et que voulait-il au juste de moi ?

Un tas de questions me tourmentaient l’esprit lorsque tout à coup, nous atteignîmes le seuil de la maison de Vanessa. Sans plus attendre, Vanessa descendit du véhicule et nous fit au revoir d’un signe de la main.

Papa redémarra encore le véhicule et nous reprîmes le chemin de notre maison. Quelques minutes plus tôt, nous arrivâmes à la maison. Je descendis du véhicule que papa avait stationné dans la cour, sur les pavés triangulaires d’où poussaient quelques mauvaises herbes récalcitrantes.

Après avoir traversé la cour et la véranda, je montai enfin les marches des escaliers. Je me dirigeai vers maman pour lui dire "bonsoir", cette salutation qui nous a toujours été soumise du retour de l’école. C’est alors que je fus soudainement stoppée par une parole venant de mon père.

– Arrête-toi là, m’ordonna-t-il d’une voix tonitruante.

Je n’avançai plus aucun pas.

– Avec qui étais-tu en train de bavarder dans la rue ? continua-t-il, impassible.

– Personne, papa, lui répondis-je pâle et triste.

– Veux-tu que je te bastonne d’abord, c’est ça ?

– Papa, je vous jure que je ne le connais même pas.

– Tu ne le connais pas ?

– Non papa, je suis sérieuse.

– Tu ne le connais pas et pourtant tu étais debout avec lui en train de bavarder tout ce temps ?

– Papa, il me posait des questions auxquelles je ne savais quoi répondre.

– Et pourquoi tu ne pouvais pas le surpasser ?

À cette interrogation, je me tus.

– La prochaine fois que je te verrai encore debout avec n’importe quel homme en train de parler, tu verras ce que je te ferai, imbécile. Allez, dégage de ma vue.

– Merci, papa ! exclamai-je en détalant.

Je bougeai des lieux et me dirigeai vers maman qui nous écoutait attentivement assise sur le divan.

En fait, dans ma famille, très souvent quand papa parlait, c’est le silence absolu. Plus personne ne pipe mot lorsqu’il parle. Je me demandais si c’était uniquement dans ma famille que régnait cette loi. Mais, j’ai finalement compris que dans d’autres familles, pendant que papa parlait ou grondait sur les enfants, la maman leur venait au secours même quand ces derniers étaient en erreur. Or, cet état de chose fait parfois que les enfants deviennent non seulement irrespectueux envers les adultes mais aussi des enfants récalcitrants dans la société.

Bref, dans ma famille, tout était planifié et lorsque maman ou papa mettait en vigueur sa loi, aucun d’entre eux ne s’y interposait.

Pour mes parents, l’éducation d’un enfant ne dépendait pas uniquement d’un seul parent. Et d’ailleurs, papa ne passait pas assez de temps avec nous. Il passait le plus clair de son temps au service qu’à la maison.

Mes parents étaient très rigoureux et à défaut de cette rigueur, mon unique frère a choisi d’aller s’installer définitivement au Togo, un des pays frontaliers du Bénin.

J’entends souvent dire que les benjamins étaient les plus choyés, les plus chouchoutés et les plus gâtés. Chez moi, dans ma famille, c’était pratiquement le contraire.

***

Il sonnait quatorze heures trente minutes. Je m’étais déjà apprêtée pour me rendre à l’école. Sur le point de vouloir quitter le salon, maman m’interpella et me dit avec gentillesse :

– Ma fille, j’entendais ton père te reprocher quelque chose cette après-midi. J’aimerais que tu l’obéisses comme d’habitude. Regarde-toi, tu n’as que seize ans. Il faut fuir les hommes et aussi la mauvaise compagnie. Prends ta sœur pour exemple. Puisqu’elle s’en fiche des hommes, as-tu vu combien elle brille à l’école ? C’est parce qu’elle n’a pas mis en tête les histoires amoureuses. Tu ferais mieux de l’imiter, elle pourrait te servir de modèle. Arrivée à l’école, va directement dans ta salle de classe. À la fin des cours, reprends immédiatement le chemin de la maison. Si tu ne m’écoutes pas et que tu vas faire le contraire, je ne serai pas d’accord avec toi.

J’acquiesçai de la tête et répondis calmement « merci maman ».

– Vas-y et sache que si tu y obéis, tu auras ma bénédiction.

– Merci maman, dis-je de plus belle avant de sortir de la pièce.

Ce m’était incroyable. Ce jour me parut très étrange car, c’était la première fois que je voyais ma mère me conseiller. C’était vraiment pour moi une grande joie. Même en chemin, j’étais très heureuse en me rappelant de ses beaux conseils. Heureuse parce qu’au moins, j’avais senti que j’avais une mère dans ma vie.

Quelques minutes de marches, j’arrivai sur le portail de mon école. Un portail au chevet duquel était écrit : CEG MALANHOUI. C’était le nom de mon école.

À mon arrivée, j’aperçus à ma grande stupéfaction, le même jeune homme qui m’avait abordée à midi sur le chemin du retour de la maison. Cette fois, il était dans son uniforme kaki. Malgré la tenue qu’il avait portée, je le reconnus.

« Mais, pour quoi m’en veut-il au juste ? » me demandai-je à en couler des larmes.

– Que me voulez-vous encore ? m’enquis-je, déprimée.

– Tu le sais bien ! répondit-il au bout d’un interminable silence.

– Non, je n’en sais rien ! Et vous savez, à cause de vous, j’ai été sévèrement battue à la maison cette aprème par mes parents et si vous allez continuer, je vous jure que je vous signalerai aux membres de l’administration de l’école et c’est d’ailleurs ce que je compte faire.

– Ne sois pas stupide, ma chère. Je ne suis pas là pour t’effrayer. Et surtout, je m’excuse d’avoir été la cause de de ta correction à la maison. Excuse-moi beaucoup s’il te plaît. Au fait, si tu me vois devant ta classe maintenant et à pareille heure, c’est pour te dire quelque chose qui me tient beaucoup le cœur.

– Pour me dire quoi ?

– Arrête d’être bizarre avec moi, réclama-t-il.

– Vous savez, moi j’ai cours et je dois me rendre en classe.

– Non, n’y va pas maintenant.

– Et pourquoi ?

Le jeune élève devint triste et s’emmura dans un silence total. Ce fut lorsque je voulus le surpasser qu’il me fixa d’un regard peint de tristesse.

– Ne t’en va pas. Je voudrais t’exprimer mes sentiments les plus profonds qui me font souffrir jour et nuit depuis que je t’ai vue pour la première fois.

Je fus frappée de stupéfaction car, c’était ma première fois où j’entendais quelqu’un me parler de sentiments. Étant bleue dans cette aventure, je lui demandai de quel genre de sentiment parlait-il.

– C’est pour te dire jusqu’à quel point je t’aime et combien j’ai mal à chaque fois que je te vois passer sans te l’en témoigner.

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